Il est une histoire qui n’est pas beaucoup contée dans nos écoles : le post-colonialisme français. Mais au lieu de le voir par le prisme militaire, Robin Campillo a fait le choix de parler des familles de soldats dans L’Île rouge. En résulte la découverte d’une société française, mais expatriée.
Synopsis de L’Île rouge
« Début des années 70, sur une base de l’armée française à Madagascar, les militaires et leurs familles vivent les dernières illusions du colonialisme. »
Une société militarisée dans un contexte post-colonial
Des soldats français sont restés jusque plusieurs années après la prise d’indépendance de Madagascar en 1960. Une histoire qu’on ne nous raconte pas à l’école, bien qu’on parle de la guerre d’Algérie. Pourtant, c’est symboliquement fort : les armées françaises ont aidé les armées malgaches à mettre fin à diverses rébellions du peuple.
Mais ce n’est pas vraiment de ça que traire L’Île rouge. Non, le film parle davantage de ce qu’il y a autour de ces soldats : leurs familles. Sorties de leur pays natal ou ayant été construites entre deux missions, elles se retrouvent entre elles dans des bases militaires. Chacune à sa maison, il y a une école, une église, etc. Des familles qui sont comme confinées dans une sorte de faux paradis sur Terre, mais pour trois ans, jusqu’à ce qu’une nouvelle mission leur fasse traverser la moitié du Globe.
Le sexisme était roi, mais aussi le reflet du reste de la société
Là où L’Île rouge est le plus subtil et où il se montre en film de cinéma, c’est pour parler du sexisme, envers les femmes bien évidemment. Les femmes de soldats sont forcément au foyer, s’occupent assurément des enfants puisque leurs maris sont en mission et rentrent très fatigués. Quant aux femmes malgaches, elles sont prises pour des sorcières si elles s’approchent trop des Français.
Mais tout cela n’est jamais dit, seulement montré à l’image. Cela passe par des petites réflexions des maris à leurs femmes, leur demandant de faire la cuisine, ne s’occupant d’aucune tâche ménagère ou s’amusant avec les enfants. Ce qui renforce le message ou du moins le met en avant, c’est qu’on parle d’une société militarisée, un microcosme propice au sexisme et ça le fait d’autant plus ressortir.
Et si tout se passait dans les yeux des enfants ?
L’Île rouge fait aussi un effort scénaristique et de mise en scène au travers des enfants et plus particulièrement au travers de Thomas, joué par Charlie Vaus elle. Cet enfant est un fan inconditionnel de Fantômette, le personnage de BD qui sauve les gens la nuit. Il rêverait de venir comme elle et essaie d’être aussi observateur. Alors il regarde, le plus souvent caché et analyse ce qu’il se passe, et plus précisément ce que font les adultes. C’est comme cela qu’il comprend certaines choses de la vie, que les adultes ne sont pas ceux qu’on croit, qu’ils ne sont pas parfaits. Ils peuvent être jaloux, maladroits, malheureux, heureux, tout ça à la fois.
Si on peut saluer une sorte d’effet d’environnement macro dans lequel apparaît Fantômette, j’ai un doute sur l’efficacité de cette exploitation de mise en scène. Il aurait peut-être fallu pousser le « délire » encore plus loin en faisant carrément un environnement animé, quitte à garder un personnage « live ».
Que retenir de L’Île rouge ?
En sortant de la séance, mes sentiments étaient partagés, et le sont toujours. Après tout cela, que retenir de L’Île rouge ? Il parle d’une thématique pas assez souvent abordée, traite du sexisme de manière subtile et parle du regard des enfants. Ce n’est pas qu’il se mélange entre tout cela, mais c’est peut-être qu’il ne se focalise pas assez sur une thématique.
Il y a un gros pot à côté duquel on ne peut pas passer : la dimension politique. Mis à part à la fin du film où elle ressort énormément, du point de vue des Malgaches, elle n’est qu’une sorte de fil rouge à moitié invisible. C’est vraiment dommage de ne pas avoir poussé cette dimension, surtout face aux Français qui étaient du côté du gouvernement de l’époque. Mais rien que pour son aspect historique, vous ne perdrez pas votre temps à regarder L’Île rouge.
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